Recueillir l'agrément préalable aux cessions de titres

Vous allez céder tout ou partie de vos actions ou parts sociales ? Cette opération risque probablement de requérir l'accord préalable de vos autres co-associés. Cette fiche présente une synthèse des règles applicables à la procédure d'agrément préalable des associés aux cessions de titres.

Fiche actualisée il y a 4 mois

Qu'est-ce qu'une clause d'agrément ?

Dans le cadre d'une cession de titres, le cédant et le cessionnaire sont tenus de s'interroger sur la nécessité d'obtenir l'agrément des autres associés de la société.

La clause d'agrément permet de contrôler l'entrée de nouveaux associés dans la société ou dans certains cas le renforcement de la participation de certains associés ou actionnaires en conditionnant la réalisation d'une opération de cession de parts sociales ou d'actions à l'accord préalable de tout ou partie des associés de la société non impliqués à l'opération.

La procédure d'agrément a donc pour but principal de protéger les intérêts des associés en place et de préserver le caractère intuitu personae de la société. Elle peut également permettre d'éviter un changement de majorité en maintenant la répartition originelle du capital social (lorsque X envisage de céder à Y qui est déjà associé).

Elle ne peut toutefois pas empêcher un associé de retirer du capital.

Les conditions d'agrément peuvent être d'origine légale, statutaire ou extra-statutaire, il peut exister dans tous les types de société sauf les entreprises unipersonnelles qui ne comportent qu'un unique associé (bien que les statuts peuvent d'ores et déjà prévoir le sort d'une telle opération si la société devient pluripersonnelle, évitant ainsi de coûteuses modifications statutaires ultérieures).

Le champ d'application des clauses d'agrément

Chaque forme juridique voit ses clauses d'agrément encadrées par la loi. Dans cette limite légale, le contenu de la clause d'agrément peut être ajusté conventionnellement par les associés.

Les associés sont tenus de préciser les conditions de mise en œuvre de la clause d'agrément dans les statuts ou par acte extrastatutaire. Nous recommandons de prévoir la clause d'agrément dans les statuts afin de garantir une nullité de l'opération en cas de non respect.

Voici un récapitulatif des modalités d'agrément en fonction des différentes formes sociales les plus habituelles :

Clause d'agrément en SAS : liberté

Dans une société par actions simplifiée, l'agrément est facultatif, il n'est possible que s'il est prévu dans les statuts par une clause.

Fondement légal : Article L227-14 Ccom : « Les statuts peuvent soumettre toute cession d'actions à l'agrément préalable de la société ».

Cette article déroge aux règles communes d'agrément à toutes les sociétés par actions (Art. L228-23 Ccom). Il est donc possible par exemple de prévoir un agrément préalable pour les cessions d'actions entre associés, conjoint ou descendant, notamment à la suite d'une dévolution successorale.

Clause d'agrément en SARL : intuitu personae et encadrement légal

La SARL est caractérisée par un fort caractère intuitu personae, cela se confirme à la lecture des règles applicables en matière d'agrément pour ce type de société.

Conditions d'agrément à un tiers en SARL

Concernant la cession de parts sociales, l'agrément est imposé par le législateur si le cessionnaire est un tiers.

Fondement légal : Article L223-14 Ccom : « Les parts sociales ne peuvent être cédées à des tiers étrangers à la société qu'avec le consentement de la majorité des associés représentant au moins la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. »

Les statuts ne peuvent pas y déroger et doivent se référer à minima aux conditions édictées par le législateur (consentement de la majorité des associés représentant au moins la moitié des parts). Ils peuvent prévoir des règles de majorité plus strictes mais pas plus souples.

Conditions d'agrément à un conjoint, un ascendant ou un descendant en SARL

La cession est en principe libre lorsque le cessionnaire est un membre de la famille du cédant, mais les statuts peuvent prévoir un agrément pour ces cas précis dans les limites des conditions de majorité exigées pour céder à un tiers. Ils peuvent prévoir des règles de majorité plus souples mais pas plus strictes que celle de l'article L223-14.

Fondement légal : Article L223-13 Ccom : « Les parts sociales sont librement transmissibles par voie de succession ou en cas de liquidation de communauté de biens entre époux et librement cessibles entre conjoints et entre ascendants et descendants. Toutefois, les statuts peuvent stipuler que le conjoint, un héritier, un ascendant ou un descendant ne peut devenir associé qu'après avoir été agréé dans les conditions prévues à l'article L223-14. A peine de nullité de la clause, les délais accordés à la société pour statuer sur l'agrément ne peuvent être plus longs que ceux prévus à l'article L223-14, et la majorité exigée ne peut être plus forte que celle prévue audit article. »

Conditions d'agrément à un associé en SARL

La cession au profit d'un autre associé est en principe libre, mais les statuts peuvent prévoir un agrément pour ces cas précis dans les limites des conditions de majorité exigées pour céder à un tiers. Ils peuvent prévoir des règles de majorité plus souples mais pas plus strictes que celle de l'article L223-14.

Fondement légal : Article L223-16 Ccom :« Les parts sont librement cessibles entre les associés. Si les statuts contiennent une clause limitant la cessibilité, les dispositions de l'article L223-14 sont applicables. Toutefois, les statuts peuvent, dans ce cas, réduire la majorité ou abréger les délais prévus audit article. »

Clause d'agrément en société civile: liberté

Dans une société civile, l'agrément nécessite l'accord unanime de tous les associés par défaut. Heureusement, les statuts peuvent y déroger.

Les cessions de parts de sociétés civiles se font dans les conditions d'agrément prévues par les articles 1861 à 1868 du Code civil. Ces dispositions prévoyant la possibilité d'aménagements statutaires à la procédure légale d'agrément particulièrement contraignante. Les associés peuvent tirer profit de cette liberté contractuelle pour alléger les conditions de cessions de parts de la société.

Conditions d'agrément à un tiers en SC

A notre sens les cessions à un tiers requièrent l'agrément des associés compte tenu que le législateur ne les a pas expressément exclues de l'article 1861 du Cciv. Les conditions sont déterminées librement ou à défaut à l'unanimité.

Fondement légal : Article 1861 al.1 Cciv : « Les parts sociales ne peuvent être cédées qu'avec l'agrément de tous les associés. Les statuts peuvent toutefois convenir que cet agrément sera obtenu à une majorité qu'ils déterminent, ou qu'il peut être accordé par les gérants. »

Conditions d'agrément à un ascendant ou un descendant en SC

Les cessions à un ascendant ou un descendant du cédant sont libres sauf si les statuts prévoient une clause d'agrément.

Fondement légal : Article 1861 al.2 Cciv : «  Sauf dispositions contraires des statuts, ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant. »

Conditions d'agrément à un associé ou un conjoint en SC

Dispense possible lorsque le cessionnaire est un associé ou le conjoint d'un associé.

Fondement légal : Article 1861 al.2 Cciv : « Ils (les statuts) peuvent aussi dispenser d'agrément les cessions consenties à des associés ou au conjoint de l'un d'eux. »

La procédure de l'agrément

Quand le cédant souhaite procéder à une cession de titres soumise à agrément, il doit déposer une demande d'agrément au profit de la société et des associés.

Le cédant notifie la plupart du temps la société de sa volonté de céder ses titres par lettre recommandée avec accusé de réception mais il peut également le faire par voie d'huissier.

Le cédant va notifier le projet de cession à la société en précisant le nombre de titres à céder, le prix prévu et l'identité du cessionnaire. Dès lors, la société dispose d'un délai généralement de 3 mois (modulable dans certains cas permis par le législateur) afin d'agréer ou de refuser la personne du cessionnaire prévue dans la notification. Le silence vaut acceptation, la cession sera effective en cas d'absence de réponse durant le délai imparti.

L'assemblée générale est normalement compétente pour donner l'agrément mais les statuts peuvent prévoir tout autre organe de gouvernance compétent pour y procéder.

La décision d'agrément a lieu conformément à la majorité définie par la clause.

Les conséquences du refus d'agrément

Pour rappel il n'est pas possible d'empêcher un associé de quitter la société. Dans ce contexte, si l'agrément est refusé, les titres doivent être rachetés par la société pour une réduction de capital, par les autres associés ou par un tiers agréé.

En fonction de la forme sociale de l'entreprise, la loi ou les statuts doivent prévoir un délai de trois mois généralement pour un rachat de titres à l'exception des cessions de parts sociales en SARL détenues depuis moins de 2 ans.

Dans les sociétés par actions, les organes de direction sont tenus de faire acheter les actions dans un délai de trois mois à compter de la notification de refus ou alors l'actionnaire cédant pourra réaliser la cession initialement prévue (article L228-24 al.3 Ccom).

La décision de refus d'agrément peut être contestée devant les tribunaux si elle fait l'objet d'un abus de droit ou d'une fraude.

Le non-respect d'une clause d'agrément

La cession de titres réalisée sans l'agrément des associés est inopposable à la société et aux associés.

Si la clause est prévue dans les statuts et qu'elle est inobservée, la cession de titres encourt la nullité.

L'action en nullité peut être exercée par la société ou par un ou plusieurs associés autre que le cédant dans un souci de protection de leurs intérêts. Elle doit être refusée aux tiers.

Si la nullité est prononcée, elle produit ses effets entre le cédant et le cessionnaire et entraîne l'anéantissement rétroactif de tous les effets de cette cession dans les rapports entre les parties.

Si la clause d'agrément non respectée est prévue seulement dans un pacte d'associés ou d'actionnaires, l'associé cédant pourra se voir réclamer des dommages et intérêts mais en principe la cession ne sera pas annulée.