Distinguer une convention réglementée d'une convention normale
Cette fiche a pour but de vous aider à distinguer les conventions « réglementées » des conventions dites « courantes ». On se limitera à l’étude de trois formes de sociétés : SAS, SARL et SC.
C’est quoi une convention réglementée ?
Pour éviter l’apparition de conflits d’intérêts et les abus, les dirigeants et associés d’une société commerciale ou civile qui concluent des conventions avec cette société doivent respecter une règlementation stricte.
Les conventions réglementées sont des actes juridiques qui interviennent entre une société et l’une des personnes visées par la réglementation (un associé ou le dirigeant donc, en direct ou via des entités interposées), dès lors que la convention n’est pas interdite, mais qu’elle n’est pas conclue à des conditions normales.
La loi autorise la société et ses responsables à conclure sans formalisme particulier, des conventions dites courantes à des conditions normales. Pour le dirigeant d’entreprises, il faut donc déterminer la frontière entre une convention courante que l’on définit comme les opérations habituelles de la société et les conventions réglementées qui peuvent présenter un risque pour les intérêts de la société.
Par exemple une convention normale ce sera :
Je suis gérant d’une entreprise qui propose des formations. Je fais appel à des sous-traitants tiers pour dispenser ces formations, je les mets en concurrence sur l’appel d’offre et j’en choisis un pour un tarif de 40 € de l’heure.
Cette même convention deviendrait réglementée si je fais appel à une entreprise sous-traitante dans laquelle je détiens 40% du capital social, pour un tarif à 70 € de l’heure.
Vous l’aurez compris ce principe a pour but d’éviter la situation dans laquelle un dirigeant ou un associé privilégie son intérêt personnel plutôt que celui de la société (affectio societatis).
Le contrôle strict des conventions règlementées est destiné à empêcher que la société consente, sans l’aval des associés et par l’intermédiaire des personnes titulaires du pouvoir dans la société, à des conventions qui vont bénéficier à des personnes en lien avec la société.
A titre d’exemple, relève de la catégorie des conventions réglementées :
- La vente de biens par le dirigeant à sa société
- La décision d'allouer une indemnité de départ au dirigeant
- Un contrat de bail chez le dirigeant
Qui est concerné par une convention réglementée ?
Les personnes visées par la loi concernant les procédures relatives aux contrôles des conventions réglementées sont les suivantes :
SARL
Le gérant ou un associé, s’il conclut directement la convention avec la Société ou par le biais d’une société dans laquelle il est intéressé (s’il est également dirigeant ou associé indéfiniment responsable dans cette autre entité).
Fondement légal : article L223-19 alinéas 1 et 5 Ccom
SAS
Le dirigeant personne physique ou un associé disposant de plus de 10% du droit de vote dans la société concernée ou la société la contrôlant.
En SAS il n’y a pas de notion d’intérêt indirect, contrairement aux autres sociétés commerciales.
Fondement légal : article L227-10 alinéa 1 Ccom
Sociétés civiles
Le gérant personne physique ou une autre personne morale (associée ou gérante de la société civile) dont un associé indéfiniment responsable, un gérant, un administrateur, le directeur général, un directeur général délégué, un membre du directoire ou du conseil de surveillance, un actionnaire disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % est simultanément dirigeant de la SCI.
Seules les sociétés civiles ayant une activité économique sont concernées par la procédure de contrôle. Il faut que l’objet social de la SCI indique précisément qu’elle exerce une activité économique.
Ces dispositions s’appliquent, que les conventions soient passées directement ou par personne interposée.
Fondement légal : article L612-5 Ccom
La procédure de contrôle des conventions réglementées
La procédure varie selon la forme de la société, principalement concernant l’autorisation préalable. Néanmoins, le rapport spécial rédigé par le Commissaire aux comptes (CAC) si la société en a désigné un doit comporter les mentions suivantes conformément à l’article R612-6 Ccom :
- L'énumération des conventions soumises à l'approbation de l'organe délibérant ou jointes aux documents communiqués aux adhérents en l'absence d'organe délibérant ;
- Le nom des administrateurs intéressés ou des personnes intéressées assurant un rôle de mandataire social ;
- La désignation de la personne ayant passé une convention dans les conditions du deuxième alinéa de l'article L612‑5 ;
- La nature et l'objet desdites conventions ;
- Les modalités essentielles de ces conventions notamment l'indication des prix ou tarifs pratiqués.
SARL
La validité d’une convention réglementée est soumise à son approbation obligatoire par les associés de la SARL réunis en assemblée générale ordinaire. L’approbation par un vote en AG peut se faire a priori ou a posteriori.
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Pour que les associés approuvent la convention de manière préalable, deux conditions doivent être réunies, la convention doit être conclue par un gérant non associé et la SARL n’a pas désigné de CAC. Le gérant doit alors rédiger un rapport soumis à validation. L’approbation est reçue si la décision est adoptée par un ou plusieurs associés représentant plus de la moitié des parts sociales.
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Comme pour l’approbation a priori la convention est soumise a posteriori au vote des associés, sur la base d’un rapport spécial au maximum un mois après la date de conclusion, ou dans un délai d’un mois après la clôture de l’exercice, si les conventions avaient été conclues au cours d’exercices antérieurs et poursuivies lors du dernier exercice.
Fondement légal : article R223-16 Ccom
EURL
Les conventions conclues directement ou par personnes interposées avec le gérant non associé sont soumises à la validation préalable de l’associé unique.
La convention conclue avec l’associé unique n’est pas soumise à la procédure de contrôle, mais une simple mention en est faite au registre des décisions.
Fondement légal : L223–19 alinéa 3 Ccom
SAS
La procédure de contrôle a généralement lieu a posteriori, un rapport spécial sur les conventions intervenues entre les dirigeants ou actionnaires à plus de 10% et la société doit être rédigé par le CAC et si la SAS n’en a pas désigné, par le président.
Dans la pratique, la plupart des approbations ont lieu lors de l’assemblée générale ordinaire annuelle et la personne intéressée par l’approbation peut voter sauf clause statutaire contraire, contrairement au SARL. Les statuts de la SAS peuvent prévoir un contrôle a priori pour rendre le contrôle plus strict ou encore exiger une majorité renforcée des associés.
Fondement légal : L227–10 Ccom
SASU
A l’inverse de la procédure de contrôle en SAS, les conventions conclues directement ou par personnes interposées entre la SASU et le président, l’associé unique ou s’il s’agit d’une société associée, avec la société la contrôlant ne nécessite pas la rédaction d’un rapport mais doivent être mentionnées sur le registre des décisions.
Fondement légal : L227-10, al.4 Ccom.
Sociétés civiles
La procédure de contrôle a lieu a posteriori, si aucun CAC n’est désigné, c’est le gérant qui doit présenter le rapport spécial sur les conventions réglementées à l'assemblée générale qui va statuer sur ledit rapport.
La décision d’approbation ou de non-approbation doit être actée dans le procès-verbal de l’AG.
Fondement légal : article L612-5 Ccom
La non-approbation des conventions réglementées n’entraîne pas leur caducité, leurs effets se poursuivent pour le contractant de bonne foi.
Les conséquences du non-respect de la procédure
Le non-respect de la procédure de contrôle des conventions réglementées est frappée par la nullité si elle a eu des conséquences dommageables pour la société conformément à l’article L225-42 Ccom.
Les conventions non approuvées produisent néanmoins leurs effets, à charge pour le dirigeant, et, s'il y a lieu, pour l'associé contractant, de supporter individuellement ou solidairement, selon les cas, les conséquences du contrat préjudiciables à la société. Une action en responsabilité civile peut également être intentée à l’égard du dirigeant si l’exécution de la convention cause un préjudice à la société.
Ex : Un gérant de SARL qui ne soumet pas à l’approbation des associés un contrat de location consenti par une SCI dont il est également associé sera condamné à rembourser à la société les loyers versés.
Le législateur a donc mis en place une réglementation qui contrôle les conventions passées entre l’entreprise et ses dirigeants afin d’éviter que des personnes susceptibles de contracter au nom d’une personne morale (dirigeants ou associés) privilégient leurs intérêts.
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